Clarence a lancé une partie de Tag, un défi, avec comme seule consigne de « ‘ressortir un vieux texte à prétention littéraire et le recopier avec un minimum d’explications contextuelles, pour le plus grand plaisir de tous et toutes ».
Plaisir, je ne sais pas, mais honte, certainement.
Tant pis, je me dis etpuismerde et j’en suis.
Trois textes, donc, présenté dans la chronologie de ma plume d’enfant/adolescente:
Poème intitulé « Oli » (qui était bien sûr, le joli garçon ayant inspiré cette merveille). 12 ans:
Je t’ai aimé dès que je t’ai parlé
Je t’ai aimé dès que je t’ai regardé
J’ai frissonné quand tu m’as frôlée
Et j’ai rêvé quand tu as plongé ton regard dans le mien.
Mais j’ai pleuré quand tu m’as annoncé que c’était une autre qui te faisait rêver,
frissonner.
On note un amour de la rime. Petite incartade intéressante (prometteuse?) du dernier vers, plus libre, sans majuscule, seul, contenant à lui seul toute l’intensité du poème.
Poème intitulé « Couché de soleil » (et oui, ça parle d’un couché de soleil. BAAAM). 14 ans:
En regardant par la fenêtre, j’ai vu le soleil mourir dans l’immensité étroite du fleuve. C’est un peu comme si j’avais tenu un instant d’éternité au creux de mon iris. Par des moments de telle beauté, le temps s’étire et l’attente déboule. On se sent fort, invincible et les espoirs les plus frivoles germent dans notre esprit. Les oranges, les pourpres et les rosés se marient dans une parfaite symphonie semblant vouloir illuminer le monde une dernière fois avant la grande noirceur. Ils brillent de tous feux se miroitant dans les eaux paisibles. Quand leur moment de gloire s’estompe, ils sombrent. Alors s’installe une douce torpeur bleutée plongeant la ville dans le mystère et le secret. Tout doucement, à notre insu, les dernières lueurs disparaissent et la lumière feutrée de la lune prend la relève pour veiller sur la Terre. On croit au rêve, on accuse l’imagination, mais au fond de chaque cœur, on garde orgueilleusement un souvenir immortel de cette brève vision.
On remarque que mon vocabulaire se développe. Je suis visiblement influencée par la description, que nous devons fort probablement apprendre à ce moment, à l’école. Amour de ce poème, mes premiers pas dans l’univers du poème en prose, que j’allais délaisser ensuite pour de nombreuses années.
Texte intitulé « Fusions ». 15-16 ans?
Les êtres humains s’amalgament tant et aussi longtemps qu’ils existent. Le contact des autres éveille leurs pulsions, leurs passions, leurs réalités. Et pourtant, ironie du sort, il ne semble exister aucune stabilité ou permanence dans ce jeu de fusion de vies. Ce ballet de rencontres semble hors de notre contrôle et les hommes deviennent les propres spectateurs de leur chorégraphie.
La musique déferle de partout. Mon corps tremble et ne forme plus qu’une immense onde vibrante avec le haut parleur sur lequel je suis assise. Les yeux fermés, je n’ai plus conscience de mon corps. Je suis musique. L’alcool qui coule dans mes veines se dilue dans l’onde musicale et saoule le bar entier. Je me lève. Je danse, j’ondule. Des corps se frôlent. L’alcool tue la pudeur. Réveille les pulsions. Des mains sur mes hanches et un souffle dans mon cou. Le rythme s’intensifie. Lascivité des couples s’amalgamant sous les lumières. Qui est-il, je m’en fous. Il est un corps, collé au mien, parfaitement emboîté. Respirations saccadées des deux corps. Envie d’aller plus loin. Envie de fusion totale. L’alcool de ma salive coule dans ses veines.
Portrait de fin de soirée dans un bar dansant. Connaissais-je déjà ce monde? Je ne sais plus. Une seule chose à dire: intensité adolescente à marde. Heureusement qu’on apprend à se calmer, un peu.
Constat final de cet exercice: ISH.